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  • : Le blog du Mensékhar
  • : Présentation et publication intégrale de mon ouvrage de science-fiction appelé le Mensékhar
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11 mars 2011 5 11 /03 /mars /2011 17:14

 

         La porte de service de l’hôtel claqua en se refermant derrière Eden et Adonis. Au même moment, ils entendirent la porte d’entrée qui cédait sous les coups de tête du protonyx dans un terrible déchirement d’acier.

         Ils s’étaient précipités dans une ruelle très peu éclairée. Sur leur gauche, une artère longeait le coin de l’hôtel et les conduisait droit sur Wacé et ses hommes. Les deux jeunes hommes, dans un grand effort de cohésion, commencèrent à courir dans la même direction, vers leur droite pour remonter la ruelle et s’échapper le plus loin possible de l’hôtel.

         Ils s’arrêtèrent pour reprendre leur souffle dès qu’ils estimèrent avoir mis suffisamment d’écart entre eux et Wacé. Ils s’assirent derrière un paquet d’immondices, se cachant plus par réflexe que par nécessité. Si Wacé devait subitement surgir au coin de la rue, la pile d’ordure ne constituerait pas pour eux une réelle protection.

         - Comment ont-ils pu faire pour nous retrouver si rapidement ? S’interrogea tout haut Eden.

         Adonis s’était posé la même question. Il ne pouvait pas oublier l’image du protonyx qui essayait d’enfoncer la porte de l’hôtel. Cet animal était arrivé sur les lieux avant Wacé et ses hommes, c’était certainement lui qui les y avait conduits.

         - Le protonyx a dû détecter en nous la présence du sang d’Etran, conclut-il. Ils utilisent son flair pour retrouver notre trace.

         A l’énoncé de cette évidence, Eden se releva.

         - Nous ne devons pas perdre de temps. Ils doivent déjà être à nos trousses avec leur animal de malheur.

         Adonis acquiesça d’un signe de la tête. Les deux garçons reprirent leur course effrénée dans les longs couloirs de Phylis 1. A une intersection, ils changèrent de route pour emprunter une artère plus large. Les passants s’écartaient de leur passage par crainte d’être bousculés et les regardaient bizarrement comme s’ils avaient croisé des extraterrestres. Ils étaient à la fois étonnés et amusés de voir des gens courir à perdre haleine comme s’ils avaient le diable aux trousses.

         Pour Eden et Adonis, le diable avait des pattes aux griffes d’acier et une tête de reptile aux crocs perçants. De temps à autre, ils ralentissaient leur course pour jeter un coup d’oeil en arrière. Ils se rassuraient en constatant qu’ils n’étaient pas suivis et, revigorés, accéléraient de plus belle la cadence de leur course.

         Adonis courait droit devant lui et se déconnectait de la foule qui l’environnait. Il ne percevait d’elle que des taches de couleur indiscernables qui formaient un mur bigarré autour de lui, accompagné de bruits de voix incompréhensibles qui semblaient provenir de tous les côtés.

         Il se retournait néanmoins de temps en temps pour s’assurer que son frère arrivait à suivre le rythme. A chaque fois, il était agréablement surpris de découvrir qu’Eden le talonnait de peu.

         Parce qu’il avait jeté un rapide coup d’oeil derrière lui, Adonis n’avait aperçu qu’à la dernière seconde la masse marron qui s’était avancée en travers de sa route. Il la percuta et bascula par terre. Il avait amorti sa chute en tombant sur un homme enveloppé dans une cape marron, celui là même qu’il avait heurté et renversé.

         Eden qui s’était arrêté, tendit sa main pour aider Adonis à se relever. Le jeune homme avait refusé cette aide et examinait l’homme qu’il avait bousculé. Ce dernier gisait sur le sol et semblait être inconscient. A la surprise d’Adonis, il ouvrit subitement les yeux et tendit ses mains pour presser le cou du jeune homme.

         - Tu ne pouvais pas faire attention, sale bâtard, éructa t-il en serrant de plus belle le cou de sa victime.

         Adonis, littéralement étranglé, se dégagea en assenant un coup de poing dans la poitrine de l’inconnu. Celui-ci souffla de douleur et relâcha son étreinte. Le jeune homme se releva et fit signe à Eden de poursuivre leur route. Le Proèdre avait été obligé de ralentir le pas pour permettre à  Adonis encore haletant de le suivre. L’homme qui avait été renversé avait renoncé à les rattraper, mais s’était redressé au milieu de la route pour vociférer à gorge déployée.

         - Espèces de petits voyous. Je ne vous oublierai pas.

         Les deux jeunes gens étaient déjà loin et entendirent à peine les menaces qu’il proférait à leur égard. Adonis avait récupéré son souffle et fit signe à Eden d’accélérer un peu l’allure. Son frère lui fit un geste négatif et lui indiqua une porte entre deux immeubles à sa droite.

         Sur la porte, des caractères noirs un peu effacés leur indiquait la présence  d’un  escalier : « Niveau 58. » Adonis s’arrêta devant la porte et la tira à lui. Un escalier faiblement éclairé par des lampes isolées descendait vers l’étage inférieur, tournant par petits paliers toutes les vingt marches environ.

         Les jeunes hommes commencèrent la descente, sautant par-dessus les corps des drogués qui étaient avachis sur les marches dans un état de semi inconscience. A un palier, un groupe de trois jeunes d’une vingtaine d’années n’avait pas encore été victime des effets secondaires de la pélanine. Adonis leur demanda son chemin.

         - Pourriez-vous me dire si nous sommes encore loin du spaciodrome ?

         La seule fille du groupe était beaucoup plus vive d’esprit que ses deux compagnons. Elle n’avait pas perdu le sens des affaires et tendit sa main boursouflée par la pélanine en direction de ces deux jeunes hommes si richement habillés.

         - Que m’offrez-vous en échange ? Des jeunes gens comme vous doivent vraiment être perdus pour se retrouver dans un quartier aussi sinistre. Venez-vous de la cité du haut ?

         Adonis ne répondit pas à la question de la jeune fille. Il fouilla dans ses poches et en sortit une pièce de vingt onces stellaires. C’était sa dernière pièce. En la donnant à la droguée, il se dépouillait des restes de sa maigre fortune. La jeune fille attrapa la pièce au vol et écouta ce qu’Adonis avait à lui dire.

         - Je sais qu’il y a un spaciodrome au niveau 57, dit-il. Est-ce encore loin d’ici ?

         - En sortant de cette cage d’escalier, tu arriveras dans une très large avenue. Elle traverse tout l’étage et te conduira vers le spaciodrome. Tu devras compter deux bonnes métaheures de marche. A moins que tu ne souhaites prendre le métro. C’est plus rapide mais plus dangereux.

         - Où se trouve ce métro ? S’intéressa Adonis.

         - Tu l’entendras bien à temps, ironisa la jeune fille. Mais je te déconseille de l’emprunter. L’année dernière il n’a pas pu freiner au terminus et a défoncé le spaciodrome. Tout l’étage avait été privé de courant.

         Sans plus attendre, Eden et Adonis se remirent en route. Dans leur esprit, dangereux ou pas, le métro constituait le meilleur moyen pour semer le protonyx ou du moins pour prendre une certaine avance sur lui.

         Une petite lueur brilla au-dessus de leurs têtes. Seul Eden la vit. Il tira le bras d’Adonis pour lui montrer le petit point lumineux dans un coin du mur.

         - Vois-tu cette lumière briller ? Demanda Eden.

         Adonis estimait qu’ils n’avaient pas assez de temps à perdre pour s’attarder à examiner les lumières qui éclairaient cette cage d’escalier miteuse. Cependant, Eden semblait attacher beaucoup d’importance à cet insignifiant point lumineux. Il devait certainement avoir de bonnes raisons pour cela. Adonis lui consacra quelques secondes avant de reprendre sa course.

         - Qu’est-ce donc ? Demanda-t-il.

         - Une micro caméra directement reliée aux appareils de contrôle de la Ceinture. A cet instant, les policiers de Wacé sont en train de nous visualiser et ne vont pas tarder à nous localiser.

         Adonis regarda l’objet de plus près. Le point lumineux était en réalité une petite boule de cristal et d’acier pas plus grosse qu’une perle. La partie en verre qui constituait l’oeil l’avait trahie. Dans la semi pénombre, elle avait reflété comme un miroir la faible lumière émise par une lampe toute proche.

         - Nous avons dû croiser des dizaines de ces caméras sans y faire attention, averti Eden.

         Adonis sortit son pistolet laser et visa l’oeil de verre. La boule était si petite qu’elle se désintégra, sans même éclater, en petits morceaux de poussière.

         - Il y en aura toujours une de moins, se vanta Adonis.

         Eden ne partageait pas son enthousiasme.

         - Nous allons probablement en rencontrer d’autres et les policiers vont rapidement deviner que nous nous dirigeons vers le spaciodrome, expliqua t-il gravement.  Nous devons gagner notre destination le plus rapidement possible. Je te propose de prendre le métro.

         - Oui, approuva Adonis. Et je te suggère de rejoindre la ligne de métro en empruntant les conduits d’aération comme nous l’avons fait au début.

         Le silence d’Eden valait approbation. Ils terminèrent leur descente et arrivèrent au pied de l’escalier sur un large palier. Devant la porte qui leur annonçait qu’ils étaient arrivés au niveau 57, un souffle d’air chaud s’échappait d’une grille plantée dans le plancher. La rouille avait fixé la grille à son armature de fer. Ils la descellèrent à coups de rayons laser et, après l’avoir tirée à eux, la poussèrent sur le côté.

         Le trou béant propulsait un air moite, presque suffocant. Ce réseau d’aération devait être relié avec des machines, importantes sources de chaleur. Il y avait fort à parier qu’un de ces conduits les mènerait au métro de Phylis 1.

         Ils plongèrent dans le trou et replacèrent la grille sur l’ouverture. Après être passé sous la porte de la cage d’escalier, le conduit d’aération bifurqua à droite puis à gauche. Il s’élargissait et suivait une importante avenue. Eden et Adonis tournèrent à droite pour remonter le souffle d’air chaud véhiculé par le conduit.

         Ils transpiraient sous leurs vêtements qui leur collaient à la peau. Leur progression était entravée par cet air suffoquant qui les imprégnaient de perles de sueur. Même les parois de béton suintaient.

         A une intersection, ils sentirent que l’air chaud provenait d’un conduit plus étroit sur leur gauche. Désireux d’économiser leurs forces, ils marchèrent en silence pour ne pas dépenser leur énergie en de vaines palabres. Eden rompit le silence, convaincu d’avoir une idée assez importante à soumettre à son frère.

         - Te souviens-tu des propos de la jeune fille que tu as interrogée dans la cage d’escalier ? Lui demanda-t-il.

         - Lesquels ? Répliqua Adonis en expirant l’air chaud qui envahissait ses poumons.

         - Elle a parlé d’un accident, quand le métro ne s’est pas arrêté et a dévasté le spaciodrome. Les policiers doivent nous attendre là-bas. Nous pourrions créer une diversion en leur envoyant un métro fou.

         - Nous ne pouvons pas sacrifier les passagers, refusa Adonis.

         Eden ne souhaitait pas abandonner son idée si facilement. Il argumenta.

         - Je prendrais les commandes de l’appareil pendant que tu videras les wagons à chaque station.

         A tout réfléchir, l’idée ne déplaisait pas à Adonis. La surchauffe provoquée par un tel accident priverait probablement l’étage d’énergie comme cela s’était produit lors du précédent accident. Les installations étaient vétustes et n’avaient pas dû être modifiées depuis longtemps. Sans énergie, les policiers ne pourraient plus communiquer avec la Ceinture et la Ceinture perdrait le contrôle de la fermeture des sas du spaciodrome du niveau 57.

         - Je marche avec toi, fit Adonis.

         Devant eux, le conduit d’aération se terminait par une grille de la hauteur d’un homme. Un grondement assourdissant suivi d’un violent souffle d’air chaud projeté hors de la grille, emplit brusquement le conduit d’aération. Le bruit ne dura pas et s’estompât rapidement. Eden et Adonis comprirent que la grille donnait sur la voie du métro et qu’un train venait de passer.

         La grille céda sous le feu du laser de l’arme d’Adonis. Les deux jeunes hommes remontèrent la ligne de métro et se cachèrent dans un léger renfoncement, à quelques mètres de la station qui était désertique.

         Eden traçait les plans de combat.

         - Je reste ici pour m’occuper du chauffeur. Pendant ce temps, tu gagnes le quai et tu montes dans la dernière voiture. Tu remonteras tout le train jusqu’à la cabine de pilotage pour en chasser les passagers.

         Les roues du métro grincèrent sur les rails quand il freina à son arrivée en gare. Le train ne comportait que quatre voitures. Adonis ne monta pas immédiatement dans le métro. Il attendit, regardant Eden qui sortait furtivement du sombre tunnel pour monter dans la cabine de pilotage. La porte était bloquée de l’intérieur et le jeune homme ne parvint pas à l’ouvrir.

         Adonis lui fit signe de monter quand même dans la première voiture. Eden s’exécuta. Adonis grimpa à son tour dans le train, juste avant la fermeture des portes. La dernière voiture était vide, Adonis n’eut pas besoin d’en chasser les passagers. Il se contenta de faire fondre les mécanismes d’ouverture des portes avec son laser, afin d’empêcher d’éventuels passagers de monter à la station suivante.

         Le train sortit du tunnel et s’arrêta en gare. Adonis quitta son wagon et brûla de l’extérieur la dernière serrure utilisable de la voiture. Il courut sur le quai pour remonter le train et sauta dans la première voiture où Eden l’attendait.

         Adonis braqua les deux seuls passagers de la première voiture et les força à descendre du train à la dernière minute, lorsqu’une sonnerie annonçait déjà la fermeture des portes. Eden désigna du doigt la porte vitrée qui les séparait de la cabine de pilotage.

         - Il n’y a pas de chauffeur, tout est automatique, expliqua t-il à son frère. Mais il y a quand même des commandes manuelles. La vitre qui isole la cabine est blindée.

         Adonis régla son pistolet sur la puissance maximum et fit exploser la porte sous le regard médusé d’Eden. Il se dépêcha de détruire les serrures des portes de sa voiture car le métro entrait dans une nouvelle gare. La seule porte qu’il avait laissée intacte s’ouvrit normalement à l’arrêt du train.

         - Ne laisse entrer personne, ordonna t-il à son frère avant de bondir sur le quai pour monter dans la deuxième voiture.

         Il devait y avoir une dizaine de personnes. Il les chassa du wagon en les menaçant avec son arme. Les derniers passagers effrayés venaient de sauter sur le quai lorsque les portes se refermèrent. Le train reprit sa course. Adonis condamna les ouvertures de cette nouvelle voiture et procéda de même à la station suivante avec le troisième wagon qui était presque bondé.

         Après avoir fait le vide dans le train, il rejoignit Eden dans la première voiture. Son frère se familiarisait déjà avec les commandes de l’appareil.

         - Je vais mettre la sauce, s’écria Eden tout excité.

         - Attends plutôt la dernière station avant le spaciodrome, conseilla Adonis. Cela nous évitera de rattraper le train qui nous précède.

         Après un dernier arrêt, Eden poussa à fond les commandes du métro. L’appareil prenait de la vitesse, il traversa le tunnel en trombe. Les commandes bloquées, les deux garçons sautèrent en marche avant que le train n’atteigne sa vitesse maximum. Ils se ramassèrent dans une zone d’aiguillages et roulèrent sur des rails parallèles à ceux de leur métro.

         Leurs corps étaient couverts de contusions multiples, mais ils avaient atteint leur objectif. Le métro fou lancé à toute allure prit de la vitesse dans les derniers mètres et arracha les buttoirs en fin de voie. Il enfonça le mur du spaciodrome et traversa la piste en défonçant les navettes qui se dressaient sur son passage. Certains vaisseaux explosèrent dans un déluge de feu, embrasant les installations de la spaciogare.

         Le métro arrêta sa course folle en pulvérisant la tour de contrôle du spaciodrome. Des incendies se déclenchèrent de tous les côtés, l’alimentation en énergie fut coupée, plongeant les pistes du spaciodrome et tout le niveau 57 dans le noir le plus complet.

         Eden et Adonis suivirent les traces de destruction du train. Les pistes du spaciodrome étaient parsemées d’incendies et de carcasses en feu de navettes. Des pompiers se pressaient dans l’affolement général pour éteindre les foyers qui se déclenchaient de tous les côtés.

         Les sas étaient ouverts, on entendait nettement le bruit de la tempête de pluie qui sévissait à l’extérieur de la pyramide. Eden et Adonis montèrent à bord d’une petite navette, ouverte et prête au décollage. Son propriétaire, surpris par l’accident du métro, avait dû fuir dans la panique générale.

         Adonis prit les commandes de l’appareil et le mit en route. Cet appareil médiocre n’avait pas les ailes rabattables et la cabine de pilotage ne coulissait pas pour faciliter le décollage. Il traversa néanmoins la piste sans heurt et prit son envol pour affronter la tempête de pluie de Phylis.

         La navette passa le sas.

         - En route vers la liberté, s’écria Adonis en manœuvrant l’appareil entre les bourrasques.

 

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